
Emrick SEBASTIEN fait partie de ceux qui n’aimaient pas le football au début. Il a finalement vu grandir sa passion jusqu’à vouloir devenir footballeur professionnel après être passé par le Club de Petit-Bourg ou encore le Racing Club de Rivière-Pilote. Âgé de 18 ans, il évolue actuellement parmi les U19 l’AC Ajaccio après un passage à l’US Chantilly.
Emrick, parle-nous de ton départ de la Martinique pour l’US Chantilly.
Avant d’y arriver, j’ai fait trois essais : à Arles Avignon qui a été concluant mais au même moment, le club a fait faillite donc ça a été annulé. Les deux autres essais à Nîmes et à Saint-Etienne n’ont pas été concluants non plus. Mais dans ces deux clubs j’étais au poste de défenseur central que je ne connaissais pas encore (NDLR : jouait en 6 ou en 10 jusqu’à lors) mais dans les deux clubs on m’assurait que c’est à ce poste là que je devais jouer. Après ça, j’ai pris la décision de trouver un club pour apprendre à jouer à ce poste et pour progresser. C’est là qu’on m’a parlé de l’US CHANTILLY, je les ai contactés de moi-même, je leur ai parlé de mon projet, de pourquoi je voulais venir chez eux. J’ai ensuite fait une détection et ils m’ont pris comme joueur.
C’est faire preuve de beaucoup d’audace que de contacter soi-même un club aussi jeune. Pourquoi avoir fait la démarche pour ce club-là ?
J’étais sûr de mes qualités et du fait qu’en allant dans ce club, c’était certain que j’allais progresser. C’est un club formateur avec un staff très expérimenté. Ils avaient les connaissances requises pour me transmettre les éléments dont j’avais besoin pour commencer à constituer mon bagage de footballeur ; en particulier de défenseur central, un poste qui m’était jusque là quasiment inconnu. C’est un club qui se situe à côté de la région où habite ma famille en France. Ce qui a pesé aussi pour mon départ, c’est le fait que les essais à répétition en pleine année scolaire me faisaient rater beaucoup de cours. L’école était au courant bien évidemment ainsi que les profs mais je n’avais pas de photocopies des cours manqués à mon retour. Je devais moi-même pendant que j’étais à l’essai, appeler les camarades pour être au courant de ce qui se faisait en cours ou tout récupérer à mon retour. Cela restait difficile de rattraper une semaine de cours sachant que dès mon retour, je reprenais les cours le lendemain voire le jour même. Donc j’ai décidé de partir, comme ça j’étais déjà sur place pour les essais et niveau scolaire je ratais moins de cours.
Tu te familiarises donc avec l’US Chantilly mais aussi avec la vie dans Hexagone.
Avec Chantilly, j’ai eu un apprentissage technique et tactique : au niveau de mon placement, mes déplacements… Il y a beaucoup de choses que je ne connaissais pas, des petits détails mais très important comme l’orientation des épaules par exemple. J’ai surtout pris en maturité du fait d’avoir fait ma première saison avec des seniors, certains étaient des anciens joueurs professionnels. Mais j’ai aussi mûri en vivant pour la première fois loin de mes parents. J’ai pris un appartement avec ma sœur qui, elle était sur place pour ses études. L’éloignement était très difficile à vivre au début. Le fait de ne pas avoir eu beaucoup de temps de libre, ma tante non loin de chez moi et ma sœur à mes côtés m’ont aidé à y penser un peu moins jusqu’au jour où j’ai commencé à m’y faire.
Trois ans après, tu peux dire que partir a été la bonne solution pour toi ?
J’ai raté moins de cours mais ça n’était pas plus facile. Les entraînements étaient très intensifs et ayant un retard par rapport aux autres il fallait que je donne plus qu’eux sur le terrain. Je travaillais plus que les autres, c’était très fatigant et je ressentais cette fatigue durant les cours. L’US Chantilly étant un club amateur, les heures de cours n’étaient pas aménagées. Ça voulait dire que je finissais à 18h comme tous les autres, à 19h30 j’allais à l’entraînement et à 21h je rentrais chez moi. Mais pour en revenir à ma scolarité j’ai néanmoins réussi à obtenir mon BAC ES cette année. Au niveau du foot aussi ça a été le bon choix car je ne pense pas que j’aurais progressé autant si j’étais encore en Martinique. Je pense que je serais resté milieu de terrain, je n’aurais pas découvert le poste de défenseur central, à part en sélection. Bien qu’il y ait des clubs qui savent former les jeunes martiniquais. J’ai pris de l’expérience en jouant avec des anciens pros, vraiment je ne regrette pas.
Aujourd’hui tu évolues sous les couleurs de l’ACA. Comment s’est passé ton recrutement dans ce club ?
J’ai passé deux saisons à Chantilly, j’ai été repéré par plusieurs clubs dont le Havre (HAC) et Lille (LOSC). Ils n’ont pas fait de proposition, ils m’ont juste dit qu’ils me suivaient. Mon agent a été contacté par l’AC Ajaccio (ACA) qui cherchait un défenseur central, mais ils ne m’avaient pas encore vu. Ils m’ont donc convié à une de leur détection qui avait lieu à Draguignan avec une cinquantaine d’autres joueurs venant de la région sud. Après la détection, le directeur du centre est venu me parler en privé pour me dire qu’il avait apprécié ma prestation et qu’il me rappellerait pour un possible essai au sein du club. Trois semaines après j’ai donc fait cet essai d’une semaine qui a été concluant et qui a conduit à ma signature dans le club.

Qu’est ce que ça représente pour toi de t’engager dans ce club ?
C’était mon objectif avant de venir à l’US Chantilly j’en avais parlé avec les coachs, qui m’avaient dit qu’ils m’aideraient à le réaliser. J’étais aussi très content car c’était une récompense à ces sacrifices, tel que le départ de la Martinique et la séparation avec ma famille qui est là-bas. J’ai été fier aussi sur le coup car un grand nombre de personnes me répétaient que j’avais passé l’âge pour être pris dans un club professionnel et qu’il était trop tard.
Est-ce que tu as tout de suite senti le passage d’un club amateur à un club pro ?
Oui on voit la différence tout de suite rien qu’au nombre d’entraînement. On s’entraîne tous les jours et quelques fois deux fois par jour, alors qu’en amateur je m’entraînais trois fois par semaine. Après le niveau n’est pas le même techniquement et tactiquement en comparaison avec certains clubs amateurs. Moi j’ai eu la chance d’être dans un club où le niveau était assez correct. En ce qui concerne l’exigence, ça augmente. Les coachs attendent beaucoup des joueurs car il y a de nombreux joueurs qui souhaitent intégrer des centres de formation et qui ont les qualités pour. Donc si on ne répond pas aux attentes du club on peut vite être remplacé. Mais je me suis adapté aux exigences attendues et me suis mis au niveau.
Tu vis donc désormais en Corse, que penses-tu de la ville d’Ajaccio, de ce football et de la réputation qu’on lui prête ?
La ville est très belle, beau paysage semblable à la Martinique du coup je ne suis pas trop dépaysé. Les valeurs du club et de la Corse en général sont des valeurs dans lesquelles je me retrouve (combativités, famille…). Les gens d’ici ont une ferveur pour ce maillot rouge et blanc et sont derrière l’équipe quelque soit la catégorie. Ce climat m’a permis d’avoir une intégration rapide.
Ton conseil pour un jeune joueur qui se lance dans cette aventure ?
Je lui dirais de croire en lui, en ses capacités, écouter tous les conseils de ses éducateurs depuis le plus jeune âge. Et enfin le principal c’est vraiment travail et persévérance pour y arriver car ce n’est pas chose facile. C’est le rêve de grand nombre de garçons et de plus en plus de filles aussi maintenant.