Mathias Coureur est un Martiniquais d’origine qui a vu naître sa passion pour le foot auprès d’un de ces oncles qui rêvait d’être footballeur professionnel et de son père, fan du Paris Saint-Germain. Alors qu’il n’a que 2 ans, il ne jure que par le ballon rond et sait qu’il veut être footballeur professionnel. Parti en Métropole à l’âge de 3 ans avec sa famille, c’est à partir de 5 ans qu’il commence ce parcours qui le conduira aujourd’hui en Bulgarie au sein du club de Cherno More Varna où il vit pleinement sa passion. Retour sur le parcours d’un « footballtrotteur »
Parles-moi de tes jeunes années de football en Métropole ?
J’étais au Sucy FC dans le Val de Marne, j’ai commencé à 5 ans même si au début ils ne voulaient pas que je joue, ils disaient que c’était trop tôt. Ensuite ils m’ont vu jouer et ont voulu que je reste, à chaque tournois j’étais meilleur joueur. Ils m’ont fait faire des tests au Havre, j’ai d’abord fait un entrainement avec eux cela s’est super bien passé. Puis j’ai fait un test où il y avait beaucoup de joueurs dont beaucoup de pros de maintenant. Aussi j’avais fait des tournois où de nombreux clubs m’avaient sollicité, des agents, recruteurs venaient chez moi pour voir mes parents. J’ai fait un essai au PSG ou j’ai été pris, ils sont venus chez moi j’ai presque signé là-bas mais au dernier moment j’ai eu peur d’être déçu par le club. Pourtant c’est le club de mon cœur où je rêve de jouer mais j’ai eu peur d’être déçu donc j’ai préféré aller au Havre. J’ai intégré le centre de formation du Havre à 12ans ; un des meilleurs de France et je ne regrette pas.
Tu es resté 6 ans et demi au Havre, comment se sont passées ces années ?
Ça s’est toujours bien passé, j’ai que des bons souvenirs. J’ai été champion des -14 ans fédéraux, une finale de championnat de France -16 ans. Après arrivé en -18ans ça s’est un peu gâté dans le sens où le directeur du centre a changé et je n’ai pas senti sa confiance. Il commençait à parler d’être professionnel à certains de mes coéquipiers et moi je sentais que je pouvais mais il m’a fait comprendre que moi ça prendrait plus de temps. J’avais l’impression de perdre mon temps donc je me suis dit je pars et je vais tenter ma chance autre part.
Entre temps je pensais que ça n’allait pas se faire, que je n’allais pas réussir, j’étais déçu je suis parti en cours de saison je suis retourné chez moi à Paris.
Tu n’as pas eu peur que ce soit là fin d’une carrière qui n’avait même pas débuté ?
Oui j’ai eu peur que ce soit fini ; je me suis dit en gros si ça arrive ça arrive et sinon je ferais autre chose de ma vie. Je suis parti à Créteil à côté de chez moi, j’y ai fait 6 bons mois. Puis un agent m’a proposé à Beauvais, au début c’était pour jouer avec l’équipe réserve mais au final j’ai joué avec l’équipe de National et j’ai encore fait 6 mois de fou. J’ai fini par signer pro à Nantes, en fait, en un an après mon départ du Havre, j’ai réalisé mon rêve. Je l’ai même fait avant certain de mes amis qui étaient au Havre. Donc au final mon départ du Havre, c’était un mal pour un bien !
Parlons de ton passage à Nantes.
C’est le cauchemar, en fait c’est mon rêve qui se réalise car je signe professionnel mais c’est le cauchemar qui commence. Quand j’ai signé le club était en ligue 2 et s’apprêtait à monter en Ligue 1 mais je n’ai pas joué, on m’avait dit que j’étais venu pour remplacer Da Rocha mais au final rien du tout. Du coup j’ai été prêté à Gueugnon en National, cela ne s’est pas bien passé non plus j’ai eu des problèmes dont un accident de voiture, j’ai été puni pour ça, j’ai eu des problèmes avec le coach à cause de ça… C’était la plus mauvaise période de ma vie. J’ai signé pour rien, en fait il y a un seul coach qui m’a dit qu’il voulait me faire jouer mais au moment où je signe le club ne voulait déjà plus de moi donc j’ai été poussé vers la sortie… J’ai craqué et j’ai accepté de partir sans me battre. En tout je suis resté 2 ans et demi à Nantes et après j’ai résilié mon contrat je suis parti en Espagne.
A ce moment-là j’ai fait beaucoup d’erreur de jeunesse mais pour moi je ne suis pas le seul responsable, je pense que c’est du 50-50
Qu’est-ce qui a fait que tu as lâché à ce moment-là ?
Je pense que ce sont les promesses qui m’ont été faites et qui n’ont pas été tenues, je me suis senti trahi, je n’avais pas envie de me donner à 100%, ce qui est une grosse erreur il ne faut jamais lâcher car on ne sait jamais ce qui peut se passer. Je n’ai pas rebondi tout de suite, je suis parti en Espagne, en 3ème division à Orihuela, j’y ai passé 6 bons mois. Il y avait d’autres clubs qui me suivaient en 2ème division mais ça prenait du temps à se faire. Donc J’ai signé dans un club ambitieux de 3ème division, L’Atlético Baléares, on a joué la monté en 2ème division mais on n’y est pas arrivé. Là je fais une erreur, j’ai prolongé mon contrat de 3 ans avant la fin de saison, ce qui fait que je perds du temps par rapport à ma progression. Après ça j’ai vraiment touché le fond car j’ai eu une séparation douloureuse et d’autres problèmes personnels, j’avais trop de chose en tête pour penser à jouer au foot. À ce moment-là j’ai décidé de rentrer en Martinique.
Rentrer en Martinique c’est pour toi un moyen de te retrouver, qu’est ce qui te donne envie de rejouer au foot une fois là-bas ?
Oui c’était pour me ressourcer car ma mère est rentrée en Martinique. Après je ne me voyais pas rester sans jouer au foot, étant de Saint Joseph par hasard je suis tombé sur le Golden Lion et Jeremy Ludon, qui est un ami à moi maintenant ; j’ai juste demandé à m’entrainer, comme ça. Au final j’ai eu un accueil formidable, en parlant avec les joueurs, l’encadrement le coach Jean François Go et surtout le président; M. Saint Honoré qui m’a dit qu’il comptait sur moi, qu’il voudrait que je joue pour le club mais sans plus c’était si j’en avais envie. Ils ne savaient même pas que j’étais en dépression, j’ai quand même signé, ils m’ont remonté le moral mais sans le savoir car je n’avais pas parlé de ma dépression. Ils m’ont remis sur pieds, depuis cette expérience, j’ai redécouvert mes racines, j’ai compris que la vie était dure, que j’avais de la chance d’être footballeur professionnel. D’ailleurs mes coéquipiers n’arrêtaient pas de me le rappeler « tu as joué avec qui ? » « J’aurais trop aimé être à ta place », « Comment c’est quand tu es professionnel ? »
Je pense que c’est grâce à ça qu’aujourd’hui ça va mieux, que mentalement je suis plus fort c’est la meilleure décision de ma vie d’avoir été en Martinique, je pense que ça m’a ouvert les yeux sur beaucoup de choses.
Qu’est-ce qui t’a décidé à repartir tenter l’aventure ?
J’ai vu la vraie vie, la chance que j’avais d’être footballeur professionnel, j’avais encore la possibilité d’y retourner donc je n’ai pas hésité, je suis reparti en Espagne. Même si je t’avoue que le fait de jouer à Saint Joseph c’était bien, les gens sont plus sincères, comme partout il y a des gens bien et pas bien mais ça te change vraiment du monde professionnel. Ce passage là ça m’a fait comprendre beaucoup de chose de la vie, j’ai vu comment je pouvais me comporter, éviter les erreurs que je faisais dans ma jeunesses. J’ai plus de recul aujourd’hui.
Retour en Espagne pour une année, comment as-tu vécu ce passage du monde amateur au monde professionnel ?
Je vois un grand décalage, j’ai eu du mal à m’y remettre car la charge d’entrainement est plus forte peut être qu’aussi ça m’a un peu ralenti mais c’est pour ça que j’ai travaillé plus dur car je savais que ça allait jouer. Sans compter Nantes, c’est ma plus mauvaise année de foot. Je suis tombé dans un club qui n’a pas le même style de jeux que moi. Je ne jouais pas beaucoup, souvent remplaçant, c’est là où j’ai vu que ça m’a beaucoup servi la Martinique car je n’ai pas paniqué, j’ai travaillé pour moi tout en sachant que ce travail la aurait payé pour autre part. Sans mon passage en Martinique j’aurais encore baissé les bras là je ne baisse pas les bras.
A la fin de ce deuxième passe en Espagne tu t’envoles pour la Bulgarie, comment cela a été possible ?
Les clubs bulgares faisaient partis des clubs qui me suivaient avant mon départ pour la Martinique. Ce qui m’a fait aller en Bulgarie c’est le fait de pouvoir jouer en 1ère division et de pourquoi pas, essayé de jouer la coupe d’Europe, voilà pourquoi j’ai signé. J’ai un peu hésité car quand tu entends Bulgarie tu as un peu peur mais franchement ça n’a pas l’image que nous on a en Martinique ou en France de ce pays. C’est un pays développé pas autant que la France mais assez développé, c’est une autre mentalité, je kiffe. Surtout ma ville Varna que je conseille à tout le monde en été, , la vie n’est pas chère. En fait je me suis pris d’amour pour la ville et le club où je suis.
Niveau football, est-ce que tu t’y es retrouvé par rapport à ce que tu connaissais déjà ?
Niveau infrastructures, on n’a pas les meilleures du monde mais on un stade, un terrain d’entrainement qui sont corrects. Pour tout ce qui est récupération c’est basique piscine avec de la glaçons pour les bains froids, sauna, salle de musculation… Niveau foot ce n’est pas pareil partout, c’est un peu physique, techniquement ils n’ont rien à envier mais tactiquement, sans dénigrer, ce n’est pas aussi développer qu’en France ou en Espagne.
Dis-moi, à ce jour, quel est ton meilleur moment sur le terrain depuis que tu es en Bulgarie ?
Alors je vais t’en dire deux. Le premier, celui que tout le monde connait, c’est mon but décisif qui nous permet de gagner la coupe de Bulgarie à la 118 ème minute du match. C’est un but magnifique, c’est la première coupe de Bulgarie de l’histoire du club, depuis ici ils disent que je suis une légende du club. Le deuxième, c’est tout bête mais c’est mon but en coupe d’Europe contre le Dynamo Minsk, je me suis dit que j’ai réalisé un de mes rêves de gosse, jouer la coupe d’Europe et en plus je marque un but. Même si la coupe de Bulgarie ça reste fort parce que c’est mon premier titre national, mais j’ai réalisé un rêve en marquant en coupe d’Europe donc je mets les deux sur le même piédestal.
Comment envisages-tu l’avenir, tu te vois finir ta carrière en Bulgarie ?
Pour l’instant je suis bien au club, les supporters disent que je suis une légende, je joue tous les matches, je suis titulaire…. Maintenant comme je l’ai déjà dit, j’ai eu des offres cet été ; j’ai préféré rester parce que je pense que j’avais besoin d’une année de plus, que je peux faire mieux. C’est la saison de la confirmation. Par contre à la fin de la saison, j’attends un signe du club, si le club me fait un signe et qu’on s’entend, pourquoi pas, je leur donnerai la priorité. Mais si j’ai un bon challenge ailleurs dans un grand championnat je vais y réfléchir aussi parce que je suis à un âge où je n’aurais plus l’occasion de jouer un grand championnat donc si ça se présente, pour voir ce que je vaux, pourquoi pas… Mais en tous cas, pour l’instant, je suis bien ici.
Jusqu’à quand tu te vois jouer au foot ?
Je ne me vois pas arrêter, j’ai trop peur d’arrêter le foot ! On verra bien, quand je ne pourrais plus courir j’arrêterai mais pour l’instant, j’essaye de ne pas y penser…
Quel serait ton conseil pour un jeune qui se lance dans l’aventure ?
Il faut se dire que chaque épreuve est surmontable, il ne faut jamais rien lâcher. Surtout penser à soi, pas dans le sens ne pas être collectif mais dans le sens où il faut travailler parce que parfois on a l’impression que le travail ne paie pas mais ça paie toujours, aujourd’hui, demain, dans des années, ça paie. Il ne faut pas s’arrêter devant les obstacles tenter, de le surmonter. Ne jamais lâcher mentalement et croire en soi car si on ne croit pas en soi même qui le fera pour nous ? Personne. Aussi écouter les plus anciens qui sont passés par là avant nous, ils connaissent un peu les ficelles de ce monde donc c’est important de les écouter.
Merci Mathias pour ta disponibilité et pour ce riche échange, sans langue de bois ! Bonne continuation au sein de ton club !
ByeBye Fans ( ou pas ) de Foot !!!!!