C’est du côté du Vauclin en Martinique que j’ai rencontré cette semaine un jeune homme qui se définit comme “solide”. Après avoir fait sa connaissance, j’ai tout de suite compris pourquoi il se définissait comme tel. Son portrait permet de réaliser que la vie est précieuse et qu’il faut saisir sa chance quand elle se présente, mais aussi que parfois le football s’avère être bien plus qu’une passion.
Peux-tu te présenter et nous parler de tes premiers pas dans le monde du foot ?
Je m’appelle MANERE Davy, j’ai 17 ans et joue au poste d’attaquant au Club Sportif Vauclinois. J’ai commencé à jouer au foot à 10 ans. À l’âge de 15 ans, j’ai intégré le Pôle Sportif du lycée du François, je partais la semaine à l’internat, je revenais chez moi le weekend, et cela, pendant deux ans, de la 3ᵉ à la 2ᵉ. Ça se passait bien on avait une bonne entente avec tout le monde.
En quoi consistait exactement le sport étude ?
C’est moi qui ai choisi d’y aller en 2012. Il fallait passer des tests pour intégrer le pôle, des jongles, des accélérations, etc. Le pôle était bien, c’est vrai qu’au début, c’était un peu dur de suivre les cours puisqu’on s’entrainait tous les soirs après les cours, mais je me suis adapté au fur et à mesure.
Comment a été possible ton recrutement ?
Cela a été possible grâce à mes matches en sélection de Martinique. Un recruteur m’a vu et a voulu que je fasse un essai à la Sampdoria (Italie).
En 2014, tu es donc parti à la Sampdoria, comment cela s’est passé ?
Mon recrutement s’est mal passé en Italie. Je n’ai même pas pu jouer, car il faut passer voir le médecin du club avant de s’entraîner et il n’a pas voulu prendre de risque, il m’a interdit de m’entraîner. Je n’ai pas pu montrer de quoi j’étais capable à cause de mes problèmes de santé.
De quoi s’agissait-il exactement ?
Je suis né avec une malformation au cœur, j’ai dû subir 4 ou 5 opérations jusqu’à aujourd’hui pour éliminer un petit faisceau mal placé qui aurait pu arrêter de faire battre mon cœur. Avant de partir à la Sampdoria, j’avais déjà subi quatre opérations auparavant. Je pensais que tout allait bien se passer lors de l’essai, jusqu’à ce que le docteur voit qu’en réalité le faisceau était toujours présent.
Donc tu es parti faire ton essai en Italie sachant que tu souffrais de problème de cœur, cela ne t’a pas effrayé ?
Non, je n’ai pas eu peur de repartir après toutes mes opérations, j’avais envie de réussir. Je me suis dit que c’était une opportunité de repartir à zéro, de voir ce que j’avais encore sous les pieds.
Tu rentres donc en France pour te faire opérer, comment se passe l’après-opération ?
J’ai eu deux mois de convalescence. L’aventure s’est arrêtée pour moi à ce moment-là. Je n’avais plus trop envie de continuer le foot, je l’ai mal vécu, depuis tout petit c’est mon rêve et je n’y crois plus vraiment.
Pourtant, deux mois après tu reprends le chemin des terrains, ce n’était pas un peu rapide ?
Oui, c’était rapide, mais comme on dit chez nous, je suis “chyen boule”*, je n’ai pas attendu la date exacte de reprise, ça allait bien. Je suis allé courir, j’ai vu que je n’avais pas de gêne donc j’ai repris les entrainements. Je joue au Vauclin, au CSV en sénior.
Ta dernière opération remonte à 2014, aujourd’hui comment te sens-tu physiquement ?
Je ne sens rien par rapport à mes opérations, depuis la toute dernière, je n’ai plus eu de soucis. Je sais juste que maintenant je n’ai plus le même niveau, c’est tout. Par rapport à ce que je faisais avant, je sais que j’ai perdu certains automatismes.
Est-ce que tu as un regret par rapport à ton parcours ?
Le seul regret que j’ai, c’est l’opération avant de partir faire mon essai en Italie. Je regrette que le docteur ne se soit pas bien assuré d’avoir retiré tout ce qu’il fallait au niveau de mon cœur comme ça je n’aurais pas eu à retourner en France, j’aurais peut-être pu faire une belle démonstration à la Sampdoria et y signer un contrat.
Si c’était à refaire, je l’aurais refait, mais avec plus de convictions, sans baisser les bras quoi qu’il arrive.
Est-ce que tu t’estimes quand même chanceux par rapport à tout ce que tu as vécu ?
Je vais dire oui et non… Oui, parce que j’ai eu la chance de beaucoup voyager grâce à la sélection de Martinique et en plus de partir en Italie. Mais toutes ces opérations, je ne souhaite cela à personne et encore moins de le vivre étant jeune.
Si tu avais un conseil à donner à quelqu’un qui a vécu les mêmes épreuves que toi, quel serait-il ?
Ce serait de ne rien lâcher, de continuer à croire en vos rêves, rien n’est impossible. Il arrive qu’on recrute certain jeune jusqu’à l’âge de 20 ans.
Merci Davy d’avoir accepté de nous parler de ton parcours, je te souhaite une bonne saison et surtout d’être en bonne santé.
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*Chyen Boul : se dit d’une personne passionnée de football, plus précisément par le fait de jouer au football.