Kevin PARSEMAIN est un martiniquais âgé de 27 ans. Dès son plus jeune âge, il a baigné dans le monde du football grâce à son père alors entraîneur du Club Franciscain. À l’âge de 5ans, il évolue en poussin dans ce club avec ses copains qui y sont encore. Rapidement Kevin fait ses premiers pas en senior avec le New Star de Ducos en promotion d’honneur en 2004. Lors de son premier match, il joue un rôle décisif.
Aujourd’hui Kevin est un joueur de football professionnel, son parcours n’a pas été des plus simples, c’est avec beaucoup de lucidité et de détermination qu’il nous en parle.
Kevin, raconte-nous les premières étapes de ton parcours.
J’ai d’abord connu beaucoup “d’échecs” dans mon projet de devenir un joueur de football professionnel. J’ai fait des essais, souvent aux frais de mes parents dans les clubs de Metz, Paris Saint-Germain, Amiens. Tous se sont soldés par un échec avec souvent le même constat, “Bonne technique, mais trop faible physiquement”.
Cela ne t’a pas donné envie de tout arrêter ?
J’ai continué à y croire. Dans mon projet d’évolution, jouer en Division d’honneur semblait logique. J’ai donc signé avec L’US Robert toujours sous la houlette de mon père. Auteur d’une bonne saison, j’ai tapé dans l’œil d’un recruteur (Franco Torchia) du club de Le Mans Union Club 72. Après un essai d’une vingtaine de jours comprenant un passage au FC Nantes d’une semaine, j’ai signé un contrat semi-professionnel (Stagiaire Professionnel) avec le Mans Union Club 72 quelques semaines après.
Comment s’est passé ton départ pour le Mans ?
Je suis parti en centre de formation à 18 ans. J’y suis resté un an. La particularité du centre de formation était que ma génération, “les 88” résidait un étage en dessous du centre de formation ce qui nous donnait une certaine autonomie. Après un an, j’ai pris mon appartement. On se fait rapidement des “amis” avec qui on fait les “400 coups”. Mais on ne se rend jamais compte que souvent les conséquences ne sont pas les mêmes. Les amis deviennent rapidement des connaissances et les conseils de nos proches ne suffisent pas à se remettre dans le droit chemin. Au final, cette expérience ne s’est pas super bien passée au niveau scolaire ce qui s’est répercuté sur mon humeur générale vu que j’étais plutôt habitué à avoir de bons résultats. Je suis resté deux ans et demi au Mans et six mois à Croix-de-Savoie (aujourd’hui Evian-Thonon-Gaillard).

Retour à la case départ, en Martinique ?
Je suis rentré en Martinique à 21 ans, j’y ai passé 4 années et demie dans le club du Racing Club de Rivière-Pilote. J’y ai connu mes meilleures années de football. J’ai également grandi en tant qu’homme. Grâce à la politique d’insertion sociale du club et de son président Marcel Pujar, j’ai pu reprendre mes études en toute sérénité, obtenir des diplômes et connaitre le “vrai” monde du travail. Selon moi cet accomplissement personnel, est la source de mon épanouissement actuel. Je joue au football, mais je sais au fond de moi que je suis capable de faire autre chose. Je peux ainsi juste me concentrer sur le foot et en profiter à fond jusqu’à la fin de ma carrière. Une pression en moins qui fait une grosse différence.
Tu as connu plusieurs sélections avec la Martinique, quelle importance donnes-tu à cette sélection ?
J’ai conscience que je joue d’abord pour ma propre personne mais que je représente également le football martiniquais car il faut comprendre que grâce aux bons résultats de la sélection martiniquaise de football, notamment lors de la Caribbean Cup 2012 et la Gold Cup 2013, nous sommes considérés comme un pays à part entière. Je suis donc un international martiniquais, et non pas français, ce qui est pour moi une immense fierté. J’espère donc continuer mon petit bonhomme de chemin, profité pour faire parler de mon île et ouvrir des portes pour les générations futures.
Ces sélections en équipe nationale permettent à ta carrière de prendre une autre dimension, parle-nous de « l’après Gold Cup 2013 » ?
Après la Gold Cup 2013 avec la sélection de Martinique où j’ai joué un match à Seattle, j’ai été contacté par Seattle par l’intermédiaire de mon agent en décembre qui a suivi pour faire le début de saison avec eux sous forme d’essai en janvier 2014. Pendant cette pré-saison, j’ai enchaîné les buts. Le club m’a proposé un contrat en mars. J’ai signé donc mon premier contrat pro dans le club des Seattle Sounders FC aux États-Unis en janvier 2014. C’est l’un des clubs les plus ambitieux des États-Unis. J’ai entamé une deuxième saison à Seattle, je m’y sentais plutôt bien, j’avais la confiance du staff malgré une première saison blanche en termes de matchs officiels puisque le lendemain de ma première convocation en équipe première, je me suis blessé dans un match de réserve. C’étaient les croisés du genou gauche. J’ai donc raté toute la saison, mais dans le même temps, j’ai travaillé vraiment très dur pour revenir.
Malheureusement aujourd’hui l’aventure américaine est terminée. Le club a décidé de se passer de mes services suite à des accords entre la ligue (la MLS) et l’Union des joueurs qui se résumaient à une réduction des effectifs de chaque club. Cependant, je ne perds pas espoir de rebondir le plus vite possible en France ou à l’étranger. Ce n’est ni plus ni moins le monde du football de haut niveau dans lequel il faut être prêt à toutes éventualités. Durant cette période difficile, mes parents m’ont soutenu et je l’en remercie. Ils ont toujours tenu ce discours positif et plein d’espoir qui fait qu’on n’abandonne pas. Je remercie également mes amis et compatriotes martiniquais, tels que Frédéric PIQUIONNE et Rudy Manival qui se trouvaient à Portland (Oregon) et qui m’ont beaucoup aidé et encouragé.
Si tu devais donner un conseil à joueur qui se lance dans le milieu, quel serait-il ?
Comme je l’ai dit précédemment, la vie au centre de formation est l’occasion pour de nouvelles rencontres et une certaine liberté en comparaison à la vie chez les parents. Mais c’est également l’occasion de s’écarter de la voie choisie. Vous quittez vos attaches, votre famille, vos amis, votre confort martiniquais pour prendre un risque qui est tout à votre honneur. Vous savez qu’au bout de ce périple durant lequel votre patience, votre humilité, votre abnégation et votre motivation seront vos meilleurs alliés, vous aurez la chance de vous réveiller et de réaliser que votre passion est votre travail. Mettez également toutes les chances de votre côté en ne négligeant pas l’aspect scolaire. Tout d’abord, cela vous sera bénéfique pour la suite, mais à court terme cela vous permet d’être bien vu auprès de vos dirigeants. Aucun effort n’est inutile. Vous récolterez les fruits de votre sérieux. En ce qui concerne la distance, soyons sincères, il n’y a pas de remède miracle pour supporter la distance. Votre atout majeur sera votre motivation personnelle à réussir. Ne doutez jamais de cette motivation qui vous a fait tout quitter pour poursuivre votre rêve. Voilà, bonne chance à tous. “Plis foss” !
Merci à Kevin pour sa disponibilité !